Bienvenue !

"Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s'illumine pour nous ; et ton chemin sera connu sur la terre, ton salut, parmi toutes les nations. Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ; qu'ils te rendent grâce tous ensemble !" (Psaume 67)

vendredi 29 mai 2015

La foi du symbole de Nicée-Constantinople

Introduction à la foi orthodoxe.
Extraits d'un commentaire du père Lev Gillet paru initialement dans La Voie: bulletin de la Communauté orthodoxe française en 1930.
Source: http://www.pagesorthodoxes.net/foi-orthodoxe/credo-levgillet.htm

Les pères conciliaires et l'empereur Constantin tiennent le texte du concile de Nicée.


Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre, et toutes les choses visibles et invisibles
Πιστεύω ες να Θεόν, Πατέρα, Παντοκράτορα, ποιητν ορανο κα γς, ρατν τε πάντων κα οράτων.

Dieu a créé par amour. Il aime et crée par le même acte. Dieu a fait l’homme intelligent et libre pour que l’homme à son tour pût aimer. Tous les phénomènes de l’univers sont une manifestation de activité divine.

Il n’y a pas, sur ce point, de contradiction entre la science et la foi. La foi en la création n’est pas attachée à telle ou telle théorie cosmologique. C’est à la science qu’il appartient d’examiner librement des problèmes tels que l’âge de notre planète, la formation du système solaire, la genèse et l’évolution des espèces vivantes. Quels que soient les résultats atteints par la recherche scientifique, ces résultats ne peuvent aller contre notre foi. Celle-ci se borne à affirmer que Dieu-Amour est l’origine, le sens, et la fin de tout ce qui existe.


Et en un seul Seigneur, Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles. Lumière de Lumière, vrai Dieu de Vrai Dieu, engendré, non créé, consubstantiel au Père, par qui tout a été fait.
Κα ες να Κύριον ησον Χριστόν, τν Υἱὸν το Θεο τν μονογεν, τν κ το Πατρς γεννηθέντα πρ πάντων τν αώνων· φς κ φωτός, Θεν ληθινν κ Θεο ληθινο, γεννηθέντα ο ποιηθέντα, μοούσιον τ Πατρί, δι' ο τ πάντα γένετο. 

Le Père se fait connaître à nous par son Fils. Nous sommes tous des fils de Dieu, mais quelqu’un est « le » Fils de Dieu, dans un sens unique et exceptionnel. Ce Fils, ce médiateur n’a pas été créé ou adopté. Il procède du Père par naissance spirituelle. Celui qui nous appelons Fils, c’est la Parole, le Verbe ou la Pensée éternelle du Père : Au commencement étaient la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. En elle était la vie (Jn 1,1-4). La Parole de Dieu est pour nous « le Seigneur », le maître, le guide suprême, la Lumière. Cette lumière, qui, venant dans le monde, éclaire tout homme... À tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu (Jn 1,9-12). La Parole de Dieu n’est pas une abstraction, mais une réalité vivante. Elle s’est montrée à nous sous une forme humaine et réelle, en la personne de Jésus de Nazareth, que nous appelons Christ (« oint ») et Messie (« envoyé »). L’Église confesse que Jésus, le Fils, est « consubstantiel au Père » ; et, tout en proclamant qu’il est vrai homme, elle l’adore comme vrai Dieu.
Qui pour nous, Hommes, et pour notre salut, est descendu du Ciel, s’est incarné du Saint-Esprit, et de Marie la Vierge et s’est fait homme.
Τν δι' μς τος νθρώπους κα δι τν μετέραν σωτηρίαν κατελθόντα κ τν ορανν κα σαρκωθέντα κ Πνεύματος γίου κα Μαρίας τς Παρθένου κα νανθρωπήσαντα. 

Et la Parole a été fait chair et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité (Jn 1,14). C’est cette union de la Parole de Dieu avec une nature humaine, en la personne de Jésus, que nous appelons le mystère de l’Incarnation.

L’Église professe que la naissance du Christ fait exception aux conditions ordinaires de la vie de la chair, et elle a formulé la doctrine de la « conception virginale » par l’opération du « souffle » divin ou « Saint-Esprit ». La Parole s’est fait chair « pour nous et pour notre salut ». En effet, le plan divin avait été profondément troublé. L’humanité, usant de sa liberté, s’était détournée du Dieu-Amour pour suivre les voies du bonheur égoïste. Cette infidélité première, ce « péché originel », avait introduit dans le monde la souffrance et la mort, tant physiques que spirituelles. Il fallait vaincre le mal, réconcilier ce qui était séparé, sauver ce qui était perdu. Il fallait diviniser la nature humaine. Telle était l’oeuvre de salut réservée à la Parole faite chair.


Il a été crucifié pour nous sous Ponce Pilate, a souffert a été enseveli.
Σταυρωθέντα τε πρ μν π Ποντίου Πιλάτου, κα παθόντα κα ταφέντα. 

En résistant à la tentation, en guérissant, en pardonnant, en annonçant la « bonne nouvelle », déjà le Christ nous sauvait. Mais il a voulu accomplir jusqu’au suprêmes exigences de son amour pour nous : Il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime (Jn 15,13).
Sa mort sur la croix nous a « rachetés », non dans un sens juridique ou commercial, comme si le Père réclamait une expiation sanglante du péché humain, mais parce que l’acte intérieur d’amour et d’offrande dont le crucifiement était l’expression visible réparait, et bien au-delà, toute révolte des hommes contre le Père et provoquait dans nos coeurs une réponse de conversion. La croix, que Jésus a voulue pour lui-même, est devenue le signe et la condition nécessaire de toute vie chrétienne : Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il prenne sa croix et me suivre (Lc 9,23).




Et Il est ressuscité le troisième jour selon aux Écritures ;
Κα ναστάντα τ τρίτ μέρα κατ τς Γραφάς. 

La conviction des disciples, que la pierre du tombeau n’avait pas enseveli à jamais leur Maître et son oeuvre, est devenue la foi de toute l’Église. Celle-ci proclame qu’il ne faut pas chercher parmi les morts celui qui est vivant (Lc 24,5). Le fait de la Résurrection ne peut être ni démontré, ni nié sur le plan purement historique, et il ne peut même pas être pleinement « réalise » par la pensée humaine. C’est un mystère. Mais la réalité de ce mystère est atteinte par la foi et par l’expérience spirituelle, tant individuelle que collective. La certitude et la joie de la Résurrection sont le coeur de la piété orthodoxe : « Christ est ressuscité des morts ! Par la mort il a vaincu la mort ; à ceux qui sont dans les tombeaux il a donné la vie » (Tropaire de Pâques).


Et Il est monté au Ciel, et siège à la droite du Père
Κα νελθόντα ες τος ορανος κα καθεζόμενον κ δεξιν το Πατρός. 

Les deux symboles physiques d’une ascension « au ciel » et d’une session à la droite de Dieu signifient, d’une part que le Christ a pris glorieusement possession de ce « royaume » qu’il a annoncé et où il nous a donné l’espoir d’entrer nous-mêmes (le royaume est la vie éternelle dans le Dieu-Amour). D’autre part, qu’il occupe dans le royaume al place unique qui, auprès du Père, est réservée au Fils : Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis toute mon affection (Lc 3,22).


Et Il reviendra en gloire juger les vivants et les morts ; Son règne n’aura pas de fin.


Κα πάλιν ρχόμενον μετ δόξης κρναι ζντας κα νεκρούς, ο τς βασιλείας οκ σται τέλος.

Si certains détails de ces descriptions contiennent une large part de symbolisme, ce serait aller contre toute la tradition chrétienne que de voir dans le « second avènement » et le jugement une simple image. Mais il ne faut pas se représenter une sorte de procès judiciaire. L’homme lui-même se juge et détermine son sort selon que, volontairement et sciemment, il s’est détourné ou approché du Dieu-Amour. La vie éternelle ne fait que manifester le libre choix de chaque homme, inscrit dans ses sentiments et dans ses actes.


Et en l’Esprit Saint, Seigneur qui donne la Vie, qui procède du Père, 
qui est adoré et glorifié avec le Père et le Fils, qui a parlé par les prophètes.


Κα ες τ Πνεμα τ γιον, τ κύριον, τ ζωοποιόν, τ κ το Πατρς κπορευόμενον, 
τ σν Πατρ κα Υἱῷ συμπροσκυνούμενον κα συνδοξαζόμενον, τ λαλσαν δι τν προφητν. 

Nous l’appelons « Seigneur », comme le Fils, parce que lui aussi est notre maître et notre guide. Il nous vivifie, car toute notre vie spirituelle dépend de ce « souffle ». Il est la manifestation visible du Père dans les âmes, de même que le Fils a été sa manifestation extérieure et visible. On ne peut séparer le Père de sa Parole et de son Souffle. C’est pourquoi le Père, le Fils et l’Esprit sont conjointement « adorés et glorifiés », comme étant une même essence divine en trois hypostases ou sujets. Cette formulation théologique est due aux premiers conciles, qui, sous le nom de Sainte Trinité, ont essayé d’exprimer le mystère du Père qui se manifeste à nos yeux par son Fils et vivant dans nos âmes par son Esprit.
L’Esprit Saint a « parlé par les prophètes ». Nous entendons par là que les saintes Écritures, les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, ont été rédigés par les hommes sous l’inspiration divine.
On a le droit d’appliquer les méthodes critiques de l’histoire et de la philologie, avec la pleine liberté qu’exige la science, à tout ce qui, dans la Bible, est susceptible d’une vérification de fait, d’une constatation positive. Mais le contenu spirituel des saintes Écritures ne relève d’aucune interprétation particulière. Son interprétation appartient à l’Église, parlant sous l’action de l’Esprit.


En l’Église une, sainte, catholique et apostolique.
Ες μίαν, γίαν, Καθολικν κα ποστολικν κκλησίαν. 

La totalité des croyants formait l’Église, au sens général, en non plus local et particulier, de ce mot. Les Apôtres déjà se préoccupaient d’organiser solidement les communautés chrétiennes. Les communautés de l’âge apostolique présentaient les mêmes traits généraux que les communautés chrétiennes modernes : chacune était un groupe de « fidèles », persévérant dans la doctrine des Apôtres, la fraction du pain et la prière (Ac 2,42), sous la présidence d’un intendant (épiskopos, « évêque »), entouré d’anciens (presbyteroi, « prêtres ») et de serviteurs (diakonoi, « diacres »). La tradition « orthodoxe » - celle à laquelle nous nous rattachons - n’admet ni les doctrines romanes sur l’autorité dans l’Église et en particulier sur le pouvoir du Pape, ni certaines conceptions protestantes d’après lesquelles la recherche et la découverte de la vérité religieuse seraient chose purement individuelle. La tradition orthodoxe professe qu’une communion existe entre les saints glorifiés et nous-mêmes ; nous ne les adorons pas, mais nous pouvons nous adresser à Dieu par leurs prières et nous recommander à leur intercession. En vénérant la mémoire de Marie, Mère du Seigneur, celle des Apôtres, des martyrs et des autres saints, en honorant leurs images et leurs reliques, c’est à Dieu, qui s’est manifesté en eux, que l’on rend hommage : ce n’est donc pas une idolâtrie.

La vie collective de la communauté chrétienne s’exprime surtout par les « mystères », symboles matériels efficaces au moyen desquels nous participons aux dons divins, non d’une manière mécanique ou magique, mais à condition que l’esprit humain assimile ces dons par la foi et l’amour. Le mystère central, le mystère même de l’Église et de son unité, est le « mystère de la cène » ou eucharistie : mangeant le pain rompu et buvant la coupe de vin sur lesquels l’Église a prié, nous communions, d’une manière non charnelle, mais réelle, au corps et au sang du Christ, au sacrifice de sa mort, et à tous nos frères et soeurs qui sont ses membres. L’Église est sainte, non en ce sens que tous ses membres soient effectivement saints, mais parce que la sainteté est la vocation de tous et que l’Église possède et offre tous les moyens de sanctification. L’Église est apostolique, parce qu’elle se réclame de la tradition des Apôtres et parce que, par le mystère de l’imposition des mains au moyen duquel se transmet tout office pastoral, elle remonte jusqu’à eux.
L’Église, dans sa plus profonde réalité, est, selon les paroles de Paul, le corps du Christ (1 Co 12,27), et selon l’Apocalypse, l’épouse du Christ (Ap 21,9).


Je confesse un seul baptême pour la rémission des péchés.
μολογ ν βάπτισμα ες φεσιν μαρτιν. 

Tout péché consiste à violer le sens divin de la vie, qui est amour. Le pécheur ne peut redevenir juste par ses propres mérites ou par ses oeuvres (prière, miséricorde, ascèse etc.), quoique les oeuvres soient un signe nécessaire de justification. Il est justifié gratuitement par la participation à la vie du Christ : Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2,20). Mais il faut mourir au péché - que ce soit notre péché volontaire et conscient, ou la faute originelle dont nous sommes, non coupables, mais solidaires - et naître à la vie nouvelle en Christ. Le mystère du baptême est le signe efficace de cette nouvelle naissance : Si quelqu’un ne naît de l’eau et de l’Esprit, il ne peur entrer dans le Royaume de Dieu. Le baptême est le signe extérieur nécessaire de l’appartenance à l’Église ; mais, nous l’avons dit, l’Église a aussi des membres invisibles qui n’ont pas reçu le baptême de l’eau. En accordant sa grâce, Dieu n’est limité par aucune condition matérielle. Selon l’ancienne tradition de l’Église, le mystère du « don du Saint Esprit », renouvellement de la grâce de la Pentecôte, est lié au baptême et se confère aussitôt après, sous la forme d’une onction, le « mystère de la chrismation ».
La vie en Christ, reçue au baptême, peut se perdre par des péchés ultérieurs. Le pécheur peut alors (et chaque fois) se purifier par un nouveau baptême, non plus d’eau, mais d’esprit, qui est le « mystère de la pénitence ». C’est le mystère du pardon divin accordé à la repentance du coeur, comme l’Évangile nous en offre des exemples.


J’attends la Résurrection des morts et la Vie du siècle à venir. Amen.
Προσδοκ νάστασιν νεκρν. Κα ζων το μέλλοντος αἰῶνος. μήν.


Nous entrevoyons, quoique comme au travers d’un voile, ce que pourra être pour ceux qui se tiennent à la droite du roi - ceux qui ont cherché le royaume de Dieu - la vie du siècle à venir. Il nous est plus difficile de nous représenter le sort de ceux qui meurent, par leur propre choix, séparés de Dieu. Nous l’avons déjà dit : ce n’est pas Dieu qui les juge, qui les condamne. La mort, comme une conséquence logique, les fixe dans l’état qu’ils ont choisi eux-mêmes.


lundi 25 mai 2015

"Sans ton Esprit Saint l'homme ne peut te connaître ni comprendre ton Amour." (Silouane)

par saint Silouane l'Athonite

La première année de ma vie au monastère, mon âme connut le Seigneur dans le Saint-Esprit. 
Le Seigneur nous aime infiniment. Il me le révéla dans le Saint-Esprit qu'Il me donna, par sa seule miséricorde. Il a donné le Paradis au larron, Il le donnera à tout pécheur pénitent.
Je suis mauvais devant le Seigneur, plus laid qu'un chien galeux, à cause de mes péchés. Mais j'ai prié Dieu de me les pardonner et voici que non seulement Il m'a accordé le pardon mais encore le Saint-Esprit, et dans le Saint-Esprit j'ai reconnu Dieu lui-même.

Viens, Seigneur, consume mes péchés qui me cachent ton Visage comme les nuages cachent le soleil. Mon âme ne désire rien de terrestre mais seulement le ciel.

Ô Miséricordieux, donne ta grâce à tous les peuples de la terre afin qu'ils Te connaissent, parce ce que sans ton Esprit Saint l'homme ne peut te connaître ni comprendre ton Amour !

Répands en nous, Seigneur ton Esprit Saint, puisque Toi et tout ce qui est tien ne peut être connu que par cet Esprit que Tu as donné tout d'abord à Adam et puis aux saints prophètes et aux chrétiens.

Seigneur, accorde à tous les peuple la vertu de ta grâce afin qu'ils Te connaissent dans le Saint-Esprit et Te louent dans la joie, puisque même à moi, impur et misérable, tu as accordé la joie de Te désirer. Aussi mon âme brûle d'un amour inextinguible envers Toi, jour et nuit.

Ils sont bien à plaindre les hommes qui ne connaissent pas Dieu. Ils ne voient point la Lumière éternelle et après la mort s'enfonceront dans les ténèbres éternelles. Mais le chrétien, dans la foi, connaît la Lumière parce que le Saint-Esprit a révélé aux saints les choses du ciel et de l'enfer. 

Les hommes ne connaissent pas la force de l'Humilité du Christ et désirent alors les choses terrestres ; mais l'homme ne peut arriver à la puissance de ces paroles du Seigneur sans le Saint-Esprit.

Qui les a pénétrées ne les abandonne  plus, même si tous les trésors du monde lui étaient offerts.

Le Seigneur nous a donné l'Esprit Saint, et nous avons connu le Seigneur et oublié la terre, dans les joies de l'Amour du Christ. Celui qui a savouré cet Amour de Dieu ineffablement doux, ne peut plus songer aux choses de la terre ; il se sent attiré sans cesse par cet Amour. Mais nous le perdons par notre orgueil et notre vanité, par nos inimités et nos jugements envers nos frères ; nous l'abandonnons par nos pensées cupides et notre propension vers la terre. Alors la Grâce nous abandonne, et l'âme troublée et déprimée désire Dieu et L'appelle, comme Adam chassé du Paradis. Mon âme languit et je Te cherche avec des larmes ; vois mon affliction, illumine mes ténèbres, afin que mon âme soit dans la Joie ! Seigneur, donne-moi ton Humilité afin que ton amour soit en moi et que ta crainte vive en moi !
Où es-Tu, ma Lumière et ma Joie ? Le parfum de ton passage est resté dans mon âme et j'ai soif de Toi ! Mon coeur est sans courage et rien ne me donne de joie. Je T'ai attristé, et Toi, Tu t'es caché de moi. Mon coeur T'aime, aussi Te désir-t-il, Te cherche-t-il en pleurant. [...] Mon âme t'aime Toi, et non le monde pour si beau qu'il soit. C'est Toi que je désire, Seigneur. Je ne puis oublier ton regard tranquille et doux ; je t'en supplie avec des larmes: viens, entre chez moi, purifie-moi de mes péchés. 

Qui est instruit par le Saint-Esprit comprend tout, son âme se sent comme au Ciel, car l'Esprit Saint lui-même est au Ciel et sur la terre, dans la sainte Ecriture et dans les âmes de tous ceux qui aiment Dieu.

Les saints prophètes et les amis de Dieu étaient remplis du Saint-Esprit ; voilà pourquoi leurs paroles étaient puissantes et le peuple acceptait la Parole du Seigneur.

Humilions-nous, et le Seigneur nous fera goûter la force de la prière de Jésus et l'Esprit Saint instruira nos âmes. Revêtons-nous de l'humilité du Christ et le Seigneur nous fera goûter la béatitude de la prière.
L'Esprit Saint est comme une mère qui aime son enfant et communie à ses sentiments. Il se fait connaître dans la prière humble, souffre avec nous et pardonne, guérit et instruit. 

Mais le Seigneur ne peut se révéler à l'orgueilleux ; ce dernier ne connaîtra jamais son Visage, même s'il possédait la science de l'univers. Le coeur de l'orgueilleux ne laisse pas de place en lui pour la bénédiction de l'Esprit Saint.

Saint Silouane l'Athonite (1866-1938) : moine au Mont Athos




lundi 18 mai 2015

"Ils furent tous remplis du Saint-Esprit" (Ac 2) - Fête de la Pentecôte

par le Père Cyrille Argenti


Avec la langue, on parle. Avec une langue de feu, on parle la Parole de Dieu.
Le Christ on pouvait le voir sans le reconnaître ; on pouvait le voir et le crucifier ; on pouvait entendre sa voix et ne pas le croire. Mais l'Esprit parle directement à l'intimité du coeur ; il communique la Parole du Fils à l'esprit même de l'homme ; il crée avec Dieu un contact "coeur à coeur".
Le chef d'orchestre invisible, qui rassemblait et rassemble les chrétiens autour du Christ ressuscité, qui fait de tous les membres de son Corps l'Eglise, c'est le Saint Esprit. C'est lui qui parle à leur conscience et les fait communiquer de l'intérieur dans l'unité de la foi, dans une communion à la même Parole, au même Christ, à la même vérité.

L'Eglise n'est donc pas essentiellement une institution, c'est-à-dire une organisation avec des statuts et des règles de fonctionnement, même s'il a bien fallu qu'elle en acquière. Elle est la présence mystérieuse du Fils de Dieu prenant chair, par l'opération du Saint Esprit, dans une assemblée de pécheurs qui croient en la résurrection de leur maître et la proclame au monde.

Nous devenons ce corps lorsque rassemblés d'un seul coeur pour manger "le pain venu du ciel" et boire "le sang de la Nouvelle Alliance", nous disons à Dieu le Père: "Nous te demandons et te supplions, envoie sur nous et sur ces Dons ton Saint Esprit." 

Cette présence de l'Esprit, ce désir de l'Esprit caractérise la nature essentielle de l'Eglise.

L'Eglise est donc l'assemblée des fidèles dont la vocation et d'implorer, au nom du Fils, la descente du Saint Esprit pour eux-mêmes et pour le monde, pour le renouveau et la recréation du monde, de l'univers, du cosmos entier, de tout notre monde pollué. De même que la lumière passe à travers la fenêtre, l'Esprit peut traverser la matière et la transfigurer.

Les apôtres lors de la Pentecôte. En bas, dans une cavité noire, le vieillard représente la création entière (le cosmos) qui est encore prisonnière des ténèbres et attend avec impatience la libération qu'apporte le Saint Esprit.

Le Saint Esprit, en nous unissant corps et âme à Celui qui est "l'image du Dieu invisible", rend de plus en plus brillante l'image de Dieu en chacun de nous. Il est Celui par qui "nous sommes transfigurés de gloire en gloire en cette même image par le Seigneur qui est Esprit." 

Croître en Christ, image parfaite de Dieu, pour réaliser pleinement cette ressemblance selon laquelle nous avons été créés, tel est le but de notre vie.

Nous pourrons l'atteindre dans la mesure où nous supplierons sans cesse le Père d'insuffler en nous son souffle, son Saint Esprit. Projetant ainsi en nous l'image du Fils, nous serons de plus en plus semblables à notre divin modèle et unis à la divine beauté. En d'autre termes nous serons christifiés.

Oui, "Dieu a envoyé l'Esprit de son Fils dans nos coeurs " (Gal 4, 6). Mais en sommes-nous toujours conscients ? Tout comme le Fils de Dieu cache sa présence sous l'aspect humain d'un enfant de Bethléem, de même l'Esprit cache sa présence au plus profond de nous, à la source de notre volonté et de notre liberté. Quand nous faisons quelque chose sous l'influence de l'Esprit, nous ne le faisons pas à cause d'une pression extérieure, mais par une impulsion qui vient du plus profond de notre coeur.

Un chrétien orthodoxe sera donc celui qui, chaque matin appellera le Saint Esprit en disant: "Roi Céleste, Consolateur, Esprit de Vérité, toi qui es partout présent et qui remplis tout, Trésor de tout bien et Donateur de vie, viens et demeure en nous, purifie-nous de toute souillure et sauve nos âmes, Dieu bon".

ARGENTI Cyrille, N'aie pas peur, Paris, Cerf, 2002, p. 84ss.
Tiré de: Daniel Bourguet, L'Evangile médité par les Pères: Jean, Lyon, Olivétan, 2010


Cyrille Argenti naît en 1919 à Marseille dans une famille d'origine grecque.
Durant la seconde guerre mondiale, alors que Marseille est occupé par les Allemands, il aide à sauver plusieurs dizaines de juifs, ce qui lui vaut d'être déclaré "Juste parmi les nations" par le Yad Vashem. Il sera par ailleurs arrêté par la Gestapo en 1944 et sauvé de façon miraculeuse.
Devenu moine sur l'île grecque de Paros, il est ordonné prêtre en 1950 et officie à Marseille. En 1962, il célèbre la première liturgie en français. 
Il lutta pour l'indépendance de l'Eglise vis-à-vis du pouvoir civile, ce qui lui valu d'être menacé.
Toute sa vie il se préoccupa des clochards et des pauvres tout en conservant en même temps le gout de l'enseignement théologique et de la formation spirituels de ses paroissiens. 



vendredi 8 mai 2015

Lire une icône (I) : la symbolique du corps humain

L'icône ne cherche pas à présenter l'homme dans sa réalité physiologique, par le détail réaliste de chaque membre de son corps comme l'ont fait les peintres de la Renaissance. Le but visé par l'icône n'est pas le réalisme physique, mais le réalisme théologique. La représentation des corps laisse d'ailleurs de côté les détails inhérents à l'âge ou à la race. Comme le relève le Père Michel Quenot (p. 35): "Le saint défunt fortement âgé n'est ainsi pas représenté comme un vieillard croulant mais avec les marques de la maturité spirituelle."
De même, l'icône dans sa représentation  des visages présente l'homme théologiquement parfait (et non pas aux proportions parfaites, ni encore dans la sensualité débridée de certaines oeuvres du XIVe). C'est l'homme déifié qui est peint dans l'icône, l'homme à l'image et à la ressemblance de Dieu. D'ailleurs bien souvent les saints ont des traits relativement proches de ceux du Christ ; l'Homme-Dieu par excellence, qui permet et ouvre la déification à l'humanité.

Icône du Christ Pentocrator

Les yeux

Ils sont souvent grands, largement ouverts. Se tenant devant l'icône, ce n'est pas tant moi qui la regarde que moi qui suis regardé par elle. Les yeux de l'icône, "inexpressifs" au premier abord sont souvent comme un miroir pour celui qui regarde l'icône lui révélant ainsi beaucoup sur lui-même. Plutôt qu'inexpressifs, je dirais donc qu'ils sont entièrement tournés et plongés dans la contemplation de Dieu, d'où leur impassibilité paisible.

Les oreilles

Elles sont discrètes, souvent cachées par les cheveux. Elle sont comme repliées vers l'intérieur, n'écoutant plus tant les bruits de ce monde qui passe, mais restant concentrées sur la Parole de Dieu qui a établi sa demeure dans le coeur. C'est pourquoi les oreilles sont comme tournées vers le coeur.

La bouche

L'humanité a chuté parce que "l'arbre semblait bon à manger" (Gn 3,6). Par la bouche de l'homme, le péché est entré dans le monde. La bouche est le symbole de l'amour du plaisir, des biens matériels qu'on cherche à dévorer inlassablement et insatiablement pour combler le vide intérieur. Dans l'icône en revanche, la bouche est très fine, "réduite à l'extrême" comme le relève Michel Quenot (p. 29). La bouche dans l'icône est dépourvue de toute sensualité.
Neutre, elle n'esquisse ni sourire ni expression particulière ; c'est signe de la paix intérieure parfaite.
Détail d'une icône de la Vierge: un nez fin, une bouche très fine,
de petites oreilles et des yeux grands ouverts.

Le nez

Les mentions de l'odeur ne sont pas rares dans la Bible (qu'il s'agisse d'odeurs douces ou nauséabondes.) Le nez de l'homme déifié est appelé à respirer "la bonne odeur du Christ" (2 Corinthiens 2,15) pour que l'être entier exhale cette bonne odeur ; c'est cela la fameuse odeur de sainteté. Dans l'icône le nez est fin, il ne se laisse plus séduire par la suavité des odeurs du monde, mais respire uniquement par le Souffle de l'Esprit Saint.



Les joues, le front, le menton et la barbe

Les joues apparaissent souvent creusées et burinées par les jeûnes et les veilles, révélant ainsi l'ascèse constante et dure de certains saints.
Saint Jean Baptiste: traits marqués par l'ascèse


Le front apparait parfois large et important, cela pour signifier l'intelligence et la grande sagesse qui y réside.
Maxime le Confesseur: un large front qui renferme une grande sagesse


Le menton des hommes est caché par une barbe fournie, tressée ou encore hirsute qui révèle la fonction de la personne : la barbe varie selon que l'on est évêque ou ermite.
Saint Pierre et Saint Paul: deux exemples de barbes différentes


Les cheveux

Il forment souvent (en particulier pour le Christ et pour sa Mère) une couronne autour du visage. Le personnage représenté est parfois chauve (comme Maxime le Confesseur), ou encore tressé comme c'est le cas dans la chevelure des anges. Les coiffures sont multiples mais révèlent toujours un aspect ou un trait de la vie du personnage. Comme tout élément de l'icône, les chevelure délivre un message sur son porteur. 
Saint Michel: archange aux cheveux tressés

Les mains et les pieds

Ce qui frappe au premier abord, c'est la taille des mains et des pieds, mais aussi leur finesse.
Mains fines, longs doigts plein de noblesse dans les icône russes, les icônes grecques en revanche tendent plutôt à présenter des doigts aux articulations saillantes qui "rayonnent la lumière et dégagent un énergie insoupçonnée" (M.Quenot, p.33).
Les pieds révèlent parfois le niveau social de la personne, selon qu'il va pieds nus ou qu'il porte des sandales. La "lumière" (hachures d'or) montrent la sainteté: on en trouve souvent dans les mains et les pieds.

Détail des mains du Baptiste

L.Papaux



Source: QUENOT Michel, Les clefs de l'icône: son langage symbolique, St.Maurice (Suisse), Saint-Augustin, 2009, p. 21-35

lundi 4 mai 2015

Vivre ma journée en communion avec Dieu

par le Métropolite Antoine Bloom

En vous éveillant le matin et avant toute chose, remerciez Dieu pour la journée qui commence, même si vous n'en avez pas spécialement envie: "Voici le jour qu'a fait le Seigneur, exultons et réjouissons-nous de ce qu'il nous soit accordé." Une fois terminée cette courte action de grâces, prenez le temps de voir à quel point ce que vous venez de dire est vrai, ne serait-ce qu'au niveau de la conviction profonde, à défaut de l'exultation.

Ensuite, levez-vous, faites votre toilette et tout ce que vous avez à faire, puis revenez à Dieu. Revenez à lui convaincu de deux choses: la première, que vous appartenez à Dieu ; la seconde, que cette journée lui appartient également et qu'elle est totalement neuve et unique. Elle n'a jamais encore existé. Elle est, dirait-on en Russie, comme une vaste étendue de neige immaculée. Personne ne l'a encore foulée aux pieds. Elle s'étend toute pure et vierge devant vous. Et ensuite, que faire ? Il faut demander à Dieu qu'il bénisse cette journée, que tout en elle soit béni et dirigé par lui. 
Il faut ensuite prendre cette journée au sérieux; si souvent nous disons "Seigneur, bénis-moi" et, après avoir reçu la bénédiction demandée nous nous comportons comme le fils prodigue: nous rassemblons tous nos biens et partons à l'étranger pour y mener une vie dissolue.

Cette journée est bénie par Dieu, elle appartient à Dieu: il faut maintenant y pénétrer. Vous entrez dans cette journée en qualité de messager de Dieu ; quelles que soient les personnes que vous puissiez rencontrer, vous les rencontrerez selon le dessein de Dieu. Vous êtes présence de Dieu, présence du Christ, présence de l'Esprit, présence de l'Evangile ; telle est votre fonction en ce jour précis. Dieu n'as jamais dit que lorsque vous aborderiez en son nom une situation donnée, c'est lui qui serait crucifié tandis que vous ressusciteriez. Vous devez vous attendre à aller d'événement en événement, au nom de Dieu, exactement comme le fit le Christ, dans l'humiliation, l'humilité, la vérité, prêt à être persécuté, etc.

Habituellement, lorsque nous sommes obéissants aux commandements de Dieu, nous nous attendons à des résultats merveilleux et immédiats, comme on lit parfois dans les vies des saints. Ce n'est pas ainsi que se passent les choses. Il faut payer le prix et très souvent il est cuisant. L'important est d'y être préparé. Pendant cette journée - si vous reconnaissez qu'elle a été bénie par Dieu, choisie par lui et de sa propre main - tout rencontre vous sera don de Dieu, qu'elle soit amère ou agréable, qu'elle vous plaise ou non. Elle est un don que Dieu vous fait personnellement et si vous la recevez comme un don, vous pourrez affronter n'importe quelle situation. Mais il vous faut accepter cette journée en toute disponibilité, que vous en aimiez ou non les événements ; si vous avancez ainsi au nom de Dieu tout au long d'une journée sortie toute fraiche de ses mains et bénie par lui afin que vous puissiez la vivre, la prière et la vie seront alors pour vous comme les deux faces d'une même pièce de monnaie. Vous agirez et vous prierez d'un seul souffle, si je puis dire, parce que toutes les situations qui se succèdent ont besoin d'être bénies par Dieu.

Extrait tiré de: METROPOLITE ANTOINE BLOOM, L'école de la prière, Paris, Seuil, 1972, p. 106-109


Pour des informations biographiques sur le Métropolite Antoine Bloom, rendez-vous au bas de cet article.